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dimanche, 21 octobre 2012

Crise : l’Europe court à la guerre civile

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Crise : l’Europe court à la guerre civile

Ex: http://mediabenews.wordpress.com/  

Il est des sujets qui sont tellement sensibles que nous préférons tous ne pas les aborder. Ne pas en parler. C’en est presque interdit.

Ce que nous ne voulons pas voir, d’autres, qui nous regardent, le voient pour nous. Nous ferions mieux, tant qu’il en est encore temps, d’écouter ceux au-delà de nos frontières qui nous observent et ont de nous une image que nous refusons de voir. Si vous êtes une âme sensible, cet article ne sera pas pour vous. Si vous souhaitez dormir tranquillement, cet article n’est pas pour vous. Si vous souhaitez poursuivre votre rêve d’une économie saine où tout va bien, cet article n’est pas pour vous.

J’écrivais il y a quelques mois dans un article intitulé « Messieurs les Allemands, sortez les premiers » le texte suivant: « La fin du « business model » des États-providence Les Etats européens, en particulier français, sont bâtis sur l’idée d’Etat-providence. La « providence » signifie que le cours des évènements est issu de l’action bienveillante d’une puissance divine (généralement Dieu). En l’occurrence, la puissance divine qui veille sur nous de la crèche au cimetière, c’est l’État.

L’État qui, à travers les allocations familiales, les pensions de retraite, la sécurité sociale, Pôle emploi, le RSA, les aides au logement, la CMU, est là pour prendre soin de nous. À tous les niveaux, il existe des « amortisseurs sociaux ». La fin du business model de l’État-providence signifie la fin inéluctable de l’ensemble de ces aides. C’est cela la rigueur, sans la planche à billets pour l’adoucir. Or la société française, par son hétérogénéité, ne pourra en aucun cas supporter une cure d’austérité à la grecque. Nos zones sensibles vivent pour beaucoup de la solidarité nationale.

A cette problématique financière se rajoutent des problématiques communautaristes (cf. rapport officiel 2011 de l’Observatoire des Zones Urbaines Sensibles). Lorsque les tensions s’exacerbent, l’histoire humaine prouve que les modérés ne l’emportent jamais. Les fragilités de la société française ne sont pas celles de la société allemande. Pour notre pays, le coût social d’une austérité brutale risque d’être insupportable et de mener à des problèmes intercommunautaires insurmontables. »

Cet article date de décembre 2011. A cette époque, l’affaire « Merah » ne s’était pas encore produite. A cette époque, Nicolas Sarkozy était président de la République. A cette époque, nous refusions d’imaginer que la rigueur puisse devenir une réalité. Nous refusions ne serait-ce qu’un instant d’imaginer que la situation de la Grèce pouvait être un avant-goût de ce que nous pourrions connaître. Après tout les Grecs, eux, l’avaient bien cherché !

Le sociologique et l’économique sont indissociables Celui qui ne regarde dans l’économie que les chiffres, les statistiques financières, les cours de bourse ou même les niveaux d’endettement, ne pourra jamais avoir une vision pertinente d’une économie s’il ne s’intéresse pas aussi aux aspects sociologiques ou sociétaux. La situation économique syrienne était plutôt très favorable il y a encore quelques mois. Le prix de l’immobilier à Damas ou à Alep aurait surpris plus d’un Français par ses niveaux plus que comparables aux nôtres.

La guerre en Irak, qui a poussé de très nombreux Irakiens à l’exil, a fortement contribué d’ailleurs à cette augmentation des prix de l’immobilier. Aujourd’hui, la Syrie est un champ de ruines, un pays ravagé par la guerre civile. Les causes de ce chaos sont d’ordre sociologique et politique et l’économique y est pour bien peu de chose. Vous me direz sans doute « mais quel est le rapport entre la Syrie et la France ? » . Je vous répondrai: aucun, mais cela ne va pas vous rassurer longtemps.

S’il n’y a aucun strictement aucun rapport entre ces deux pays, il y a une constante historique applicable à toutes les nations du monde. Un pays est stable jusqu’à ce qu’il devienne instable et retrouve une stabilité. Il y a deux ans, Angela Merkel disait que le modèle du multiculturalisme était un échec. Exprimé par la Chancelière allemande, ces propos ne sont pas anodins. Loin de là. Ils sont mêmes porteurs d’une grande menace. L’affaire du film « L’innocence des musulmans » a remis le feu aux poudres et propulsé mondialement à la « une » de l’actualité les tensions interreligieuses qui secouent le monde.

La France a découvert pétrifiée que nous abritions sur notre sol quelques milliers de personnes qui ne partagent pas vraiment les idées et les valeurs républicaines qui sont les nôtres. Les salafistes se retrouvaient dès lors sous les projecteurs. L’affaire récente du massacre de deux jeunes gens à Echirolles près de Grenoble a montré à quel point d’ailleurs nos concitoyens d’origines étrangères sont ceux qui souffrent le plus d’un climat qui désormais devient délétère et étouffant. Certains habitants ont interpellé sans ambiguïté le président Hollande lors de sa visite éclair.

Lorsque je parle aux gens, je suis désormais sidéré par la montée des inquiétudes qui s’expriment ouvertement et transcendent l’ensemble des clivages politiques. Je suis également ahuri par la radicalisation de nos concitoyens. Cela signifie qu’il s’opère actuellement, dans notre pays, un vaste mouvement de repli communautaire. En caricaturant un peu les choses (mais à peine), les catholiques se sentent de plus en plus catholiques. De l’autre côté, les musulmans de plus en plus musulmans. Tous oublient qu’ils sont avant tout Français, enfants de la République.

Lorsqu’un Merah assassine froidement des militaires français, portant l’uniforme français, « physiquement issus de la diversité » (c’est l’expression qu’il faut utiliser pour ne pas utiliser le mot « noir » ou « maghrébin »), cela répond à la logique de « tuer du traître », tuer celui qui représente l’image de l’intégration à la République.

Par un effet de miroir, à l’autre bout de l’Europe et de l’échiquier politique, un Anders Behring Breivik qui commet la tuerie d’Oslo répond à une logique identique en tout point. Il faut tuer du socialiste, du tolérant, du gaucho-bobo. Lui aussi est le traître à la pureté du pays, puisqu’il accepte l’autre et l’étranger. Dans tout cela, seules les victimes changent. Les logiques funestes restent les mêmes.

J’étais encore jeune lorsque la guerre civile a embrasé les Balkans, quelques années après la chute du mur de Berlin. Mais je me souviens. Je me souviens des massacres, je me souviens d’expressions comme « épuration ethnique », « charnier ». Je me souviens d’un général français debout sur une Jeep disant à des femmes, des hommes et des enfants « nous ne vous abandonnerons pas ». Et je me souviens qu’ils ont été abandonnés. Nous avons même entendu « plus jamais ça, pas en plein milieu de l’Europe ». Et pourtant, cela a eu lieu. Mais nous avons voulu l’oublier.

Nous avons voulu croire que nous ne pouvions pas être « politiquement » serbes ou croates, exactement de la même façon que nous ne voulons pas croire que nous puissions être « économiquement » grecs. Seule une prise de conscience nationale nous permettra d’éviter le cauchemar. Notre avenir est de devenir économiquement grecs et politiquement serbes. Que nos amis serbes me pardonnent cette phrase. Qu’ils ne voient là aucun jugement. Je pense au contraire que nous ne sommes ni mieux ni moins bien et que l’histoire vécue là-bas est en tout point en train de se reproduire ici, chez nous, sous nos yeux inconscients et incrédules.

Alors que la crise menace d’emporter dans un trou noir l’ensemble de l’économie mondiale, qu’avant cela nous devrons passer sous les fourches caudines de la rigueur et de l’austérité, nous devons être conscients que notre avenir proche est plus similaire à celui de la Grèce qu’à un long fleuve tranquille. Nous devons être conscients des dangers qui se profilent à l’horizon et qui potentiellement peuvent faire littéralement voler en éclat la stabilité de notre pays, mais plus généralement de l’Europe.

Pour repousser ce danger, les bons sentiments ne serviront à rien. Ils sont mêmes fondamentalement contreproductifs. Il faut traiter deux aspects. Le premier est bien sur économique. Plus la richesse est présente et partagée, moins les tentations de haines peuvent se développer. Au sens politique du terme, l’austérité est un non-sens. Il faut traiter l’aspect politique et sociologique. Être français, ce n’est pas une couleur de peau. Être français, c’est l’adhésion inconditionnelle au socle de valeurs républicaines. Ces valeurs républicaines de tolérance, d’égalité et de laïcité doivent être défendues avec une force absolue. La République ne doit rien céder à quelques extrémismes que ce soit. Toute démission, tout manque de courage, nous rapprochera de l’abîme.

La réalité ? Toute démission aussi minime soit-elle peut mener à « l’épuration ». Les Suisses, eux, se préparent déjà à la guerre civile européenne. Alors ceux qui ne veulent pas voir, ceux qui pensent que tout le monde est gentil, ce qui croient que nous sommes meilleurs que tous les autres, ceux qui pensent que rien ne peut nous arriver, que la stabilité est éternelle, ne manqueront pas de me dire évidemment que je suis pessimiste. Alors qu’ils sachent qu’effectivement je partage le pessimisme de nos amis suisses.

Les Suisses, conscients de ces risques majeurs pour la stabilité politique de leurs voisins, ont lancé en septembre 2012 un exercice militaire de grande ampleur. Nom de code de ces manœuvres ? STABILO DUE. Scénario ? Suite à un effondrement économique majeur et à la montée des tensions intercommunautaires et interreligieuses, des grands voisins européens, membre de la zone euro, s’enfoncent dans la guerre civile. Des milliers de réfugiés tentent désespérément de trouver refuge en Suisse.

La Confédération Helvétique mobilise dès lors 200 000 réservistes afin de sécuriser ses frontières. Nous pouvons changer les choses Au siècle dernier, les gens de confession juive ont été pourchassés, massacrés, déportés. Nous pourrions ouvrir ce nouveau siècle par le même type d’acte. Si l’histoire se répète, ce n’est jamais de façon vraiment identique.

Mais vous l’aurez compris, et ce que je vais dire est choquant, mais le prochain « juif » pourrait être le « musulman ». Et ne me dites pas que c’est impossible. Tout concourt pour rendre plausible une telle éventualité. Ne me dites pas que c’est impossible en Europe. C’est exactement ce qui s’est passé voilà à peine 10 ans dans les Balkans.

Ne me dites pas que c’est impossible, puisque l’armée suisse se prépare à de telles hypothèses. Dites-moi comment pouvons-nous faire, ensemble, pour que cela n’arrive pas. Si vous niez le problème, si vous niez l’hypothèse, alors cela se produira. La stabilité de notre pays doit être élevée au rang de priorité stratégique absolue et l’intendance « économique » devra suivre.

Cela ne pourra se faire que dans un cadre national et d’un retour à une souveraineté totale. Lorsque nos intérêts vitaux seront en jeux, l’économie, les lobbys et les intérêts corporatistes seront balayés… comme en Syrie. Pour le moment, nous courrons tout droit à la catastrophe. Mais personne ne veut le voir.

Source : Economie Matin

samedi, 01 octobre 2011

« Rouges » et « fascistes » sans haine ni rancune

« Rouges » et « fascistes » sans haine ni rancune : le témoignage édifiant d'un enfant de la Guerre d'Espagne

par Arnaud IMATZ

Ex: http://www.polemia.com/

Polémia a reçu récemment de l’historien espagnol, Arnaud Imatz, (*) contributeur occasionnel du site, un message émouvant, accompagné d’un article, écrit en novembre 2006, qui donne un éclairage peu connu de certains des événements qui se sont déroulés en Espagne durant la Guerre civile de 1936 à 1939.
L’heure est à la « diabolisation » et à la réécriture de l’histoire. L’Espagne de Zapatero n’y échappe pas. La bien-pensance y oppose les « bons » (les « Républicains ») et les « méchants » (les « Fascistes »).


La réalité fut plus complexe. Des Rouges furent victimes des Franquistes. Et des Franquistes furent victimes des Rouges. Sans parler des Rouges nombreux à être victimes d’autres… Rouges. Des familles furent partagées. Et s’il y eut des horreurs, il y eut aussi beaucoup de noblesse chez certains combattants, des deux camps. Arnaud Imatz apporte ici le témoignage de José Ataz Hernández : un fils de rouge devenu responsable phalangiste qui vient de disparaître. Un texte à lire pour ceux qui ne croient pas à l’histoire en noir et blanc et qui préfèrent la mémoire historique à la mémoire hystérique. On trouvera ici le message de l’historien et son article.

Polémia

« Je viens d'apprendre avec infiniment de tristesse le décès de José Ataz Hernández survenu le 11 septembre 2011. Ses qualités humaines, son extrême générosité, sa profonde intelligence et sa force de caractère faisaient de lui l'archétype de l'aristocrate de l'esprit, un authentique hidalgo espagnol. Merci de trouver, ci-joint, l'article que j'avais consacré à sa terrible jeunesse, il y a quelques années. Amicalement. Arnaud Imatz »

Comprendre la guerre civile espagnole c'est savoir qu'elle fut « un mélange de vanité et de sacrifice, de clownerie et d'héroïsme », écrit Arthur Koestler dans son autobiographie The Invisible Writing. Guerre totale, devrait-on dire, guerre totale entre totalitaristes de gauche et autoritaristes de droite. Dans l’Espagne de 1936, il n’y a plus de démocrates. La haine et le sectarisme s’emparent des deux camps. Mais le respect de l'autre, la noblesse et la générosité transcendent parfois les divisions. Voici le témoignage émouvant de José Ataz, un jeune « hijo de rojo » (fils de rouge), qui a connu les horreurs d’une guerre fratricide et les terribles privations de l’immédiat après-guerre. Une histoire humaine, vraie, qui à elle seule permet de comprendre la complexité de ce terrible événement historique qui a été commémoré en 2006. Une histoire qui ne juge pas, qui ne dit pas le bien, qui ne poursuit pas la diabolisation, la discrimination entre purs et impurs mais qui contribue honnêtement et modestement à la recherche de la vérité et à la sincère réconciliation.

Au mois d'août 1936, José, petit garçon de huit ans, est le témoin d'une scène atroce qui le marque à jamais. Son père, Joaquín Ataz Hernández, secrétaire du Syndicat des cheminots de l'UGT de Murcie et dirigeant provincial du PSOE, vient d'être désigné par son parti pour siéger dans le Tribunal Spécial Populaire de Murcie. Les tribunaux populaires ont été crées, fin août 1936, par décret du gouvernement. Ils sont composés de 17 juges dont 14 sont nommés d'office par les partis et syndicats du Front Populaire (libéraux-jacobins de gauche, socialistes, communistes, trotskistes et anarchistes). Le 11 septembre, le TP de Murcie siège pour la première fois : sur 27 personnes jugées, 10 sont condamnées à mort, 8 à la réclusion perpétuelle, les autres à de lourdes peines de détention. Parmi les condamnés à la peine capitale, figurent le curé de paroisse Don Sotero González Lerma et le chef provincial de la Phalange de Murcie, Federico Servet Clemencín.

Joaquín Ataz Hernández a voté la peine de mort pour le jeune chef phalangiste. L'ordre qu'il a reçu de son parti ne peut être discuté : le « fasciste » doit être exécuté. « Mon père connaissait Federico depuis son enfance, témoigne José. Ils n'étaient pas amis, mais ils s'appréciaient et se respectaient. Aussi, juste après la sentence, il s'approcha pour lui dire: "Federico, je regrette vraiment..“. » mais avant qu'il n'ait pu ajouter un mot, Federico l'interrompit : « Ne t'en fais pas pour ça, j'aurais fait la même chose avec toi, donne moi donc une cigarette! ».

Deux jours plus tard, de très bonne heure, dans la matinée du dimanche 13 septembre, plusieurs camions bourrés d'hommes et de femmes réveillent José. Le bruit court que le Gouvernement veut gracier les condamnés et la foule en ébullition, exige de faire « justice » elle même. Affolé, le gouverneur civil ordonne de procéder en hâte aux exécutions. La foule furieuse pénètre bientôt dans le patio de la prison. Elle s'acharne sur les cadavres : les corps sont profanés et mutilés sans pitié. Au milieu de la matinée, le petit José, qui joue dans la rue, voit et entend la populace vociférer. Des hommes et des femmes surexcités semblent tirer un étrange fardeau à l'aide de cordes. Avec toute la curiosité et l'agilité de son âge, José s'approche... il est saisi d'effroi. Devant lui gît un corps ensanglanté, que les chocs sur les pavés de la chaussée ont converti en lambeaux. Aucune des viragos présentes sur les lieux ne l'empêchent de voir la scène. Personne ne lui vient en aide lorsqu'il vomit et tombe inconscient sur le sol. À peine remis, il court chez ses parents en pleurant. Sa mère le console. Comment de tels actes de sauvagerie peuvent-ils être tolérés, demande-t-elle écœurée à son mari ? Le père ne répond pas tant sa honte est grande. A cet instant, ils ignorent qu'il s'agit du cadavre du curé Don Sotero Gonzalez Lerma, qui a été horriblement mutilé, trainé dans les rues et pendu à un réverbère de la façade de son église, après qu'un milicien lui a triomphalement coupé une oreille et exigé d'un tavernier qu'il la lui serve bien grillée avec un verre de vin...

Dès que possible, Joaquín Ataz Hernández, renonce à sa charge de membre du Tribunal Populaire. Fin avril 1937, il est nommé chef de service du corps des Prisons. Il dirige bientôt le camp de travail de Totana (Murcie) ou près de 2000 prisonniers politiques, condamnés à la réclusion perpétuelle ou à 30 ans de détention, vont purger leurs peines dans des conditions très difficiles mais néanmoins humaines. Le 1er avril 1939, les cloches sonnent et les pétards éclatent. José et ses deux frères observent leur père : imperturbable, il se peigne calmement pendant que leur mère sanglote : « Ne vous inquiétez pas les enfants, la guerre est terminée mais je dois partir quelques jours en voyage ». Les quelques jours vont se convertir en années.

Sous le sceau du secret, José apprend par sa mère que son père a réussi à s'embarquer vers le Mexique. Pour survivre, le petit garçon doit travailler. Il est tour à tour marmiton, apprenti charpentier, magasinier et boulanger. Il retourne enfin avec enthousiasme à l'école. Dans sa classe, tous les enfants connaissent les antécédents politiques de chaque famille mais personne ne dit mot. En octobre 1942, à l'occasion d'un cours d'instruction civique, José entend par hasard son maître expliquer que José Antonio Primo de Rivera, le leader de la Phalange, condamné à mort par un Tribunal Populaire et exécuté en novembre 1936, « considérait que la naissance du socialisme était juste ». Ces mots, dans la bouche d'un adversaire, lui paraissent si insolites qu'il se plonge dans la lecture des Oeuvres Complètes du fondateur de la Phalange. Il en ressort enthousiasmé et convaincu.

José affronte une grave crise intérieure. Serait-il en train de trahir les idéaux pour lesquels son père a lutté si honnêtement durant toute sa vie? Par chance, il peut en débattre avec lui. Depuis quelque temps, il sait que son père n'est pas exilé au Mexique mais qu'il vit caché chez ses grands-parents. Sans plus attendre, il lui rend visite et lui fait lire les discours et le testament de José Antonio. « Je lui posais franchement mon problème de conscience, dit-il, et il me répondit avec toute la générosité et la noblesse que j'attendais de lui: "Écoute mon fils, je n'ai aucune autorité morale pour te conseiller dans un domaine ou, parce que je me suis engagé à tort ou à raison, vous devez maintenant souffrir toute sorte de privations et connaître la faim. Une personne seule peut aller jusqu'au bout de ses idéaux, sans limites, mais un homme qui a une femme et des enfants n'a pas le droit de compromettre la survie de sa famille. Fais ce que ton cœur te dicte, mais fais toujours en sorte de ne pas compromettre les autres par tes décisions. Tu m'entends bien Pepe, agis toujours avec honnêteté et cohérence “. La conscience enfin libre, "ayant obtenu l'autorisation du seul homme dont je reconnaissais l'autorité sur ma personne, ajoute José, j'adhérais au Front de la Jeunesse et je pouvais enfin porter ma première chemise bleue" ». Chef de centurie du Front de la Jeunesse, il entreprend alors des études de droit et est nommé chef du SEU (syndicat officiel des étudiants) du district universitaire de Murcie.

A la fin de l'année 1948, le père de José, qui vit cloîtré depuis plus de neuf ans, décide de sortir de sa cachette. Il prend le premier train pour Madrid. Grâce à l'amitié reconnaissante de gens qu'il a aidés pendant la guerre, il trouve du travail. Pendant deux ans et demi, il est employé dans un magasin de lampes électriques de la Puerta del Sol, puis dans une fabrique de conserves, sans jamais être inquiété. Mais un jour d'octobre 1951, son fils José, alors aspirant dans un régiment de Séville, apprend qu'il a été arrêté, victime de la dénonciation d'un employé renvoyé pour malversation.

José décide de tout mettre en œuvre pour aider son père. Au printemps 1952, un Conseil de Guerre est réuni. De nombreux témoins à décharge se succèdent à la barre. Tous expliquent que la conduite de l'accusé pendant la guerre a été irréprochable. Parmi eux, certains lui doivent même la vie. C’est le cas du professeur de droit commercial de l'université de Murcie, Salvador Martinez-Moya, qui a été sous-secrétaire à la Justice dans le gouvernement du radical Alejandro Lerroux. Inflexible, le procureur demande la peine de mort. Le jury se retire et délibère de longues minutes. Enfin de retour, la sentence tombe de la bouche du président: l'accusé est condamné à 30 ans de prison... mais, en raison des diverses remises de peine et des grâces accordées, il est immédiatement libéré.

Une fois ses études terminées, José intègre le cabinet juridique de Don Salvador Martinez-Moya, qui était un témoin capital dans le procès de son père. Les hasards de la vie font qu’il y est bientôt rejoint par le fils ainé de Federico Servet, le chef provincial de la Phalange dont son père avait voté la mort. « Je m'entendais très bien avec Ramón, écrit José. Nous ne parlions jamais de nos pères, mais nous savions la tragique relation qu'ils avaient eue. Ramón était très déçu de voir que l'Espagne s'éloignait de ce que son père avait rêvé. Finalement, il partit au Mexique et nous nous perdîmes de vue ». Intelligent et travailleur, José présente plusieurs concours de l’administration. C'est le début d'une fulgurante ascension. En 1964, le sous-secrétaire d'Etat aux finances fait appel à lui. Dix ans plus tard, il est sous-directeur général du ministère des finances.

A près de quatre-vingts ans, José Ataz Hernández, veut avant tout témoigner: « Ni moi, ni mes frères (dont un est aujourd’hui socialiste), n'avons jamais eu à nous réconcilier avec personne parce que personne ne nous a jamais dressés contre les autres. Au contraire, nous avons connu de très nombreux cas, discrets et anonymes, de générosité et de grandeur d'âme, qui seraient inconcevables aujourd'hui. Un exemple : lors de l'enterrement de mon père, Manolo Servet était présent. Manolo était un de mes amis du Front de la Jeunesse et le compagnon de travail de mon frère Joaquín. C'était le second fils de Federico, le jeune chef provincial de la Phalange de Murcie qui avait été condamné à mort avec la participation de mon père. Lorsqu'il s'approcha de moi pour me présenter ses condoléances et me donner une accolade, je dus faire un effort surhumain pour ne pas me mettre à pleurer »...

Témoignage de José Ataz
recueilli par Arnaud Imatz [Madrid, novembre 2006]
20/09/2011

Note de la rédaction:

(*) Arnaud Imatz, docteur d’état ès sciences politiques, diplômé d’études supérieures en droit, ancien fonctionnaire international à l’OCDE ; historien de la Guerre d’Espagne, il a publié de nombreux livres et articles sur ce thème.

Voir notamment :

Guerre d'Espagne : mémoire historique ou mémoire hystérique ?
Retour sur l'affaire des fosses du franquisme : Garzón, juge intègre ou prévaricateur ?

Correspondance Polémia – 25/09/2011

vendredi, 28 janvier 2011

Udo Ulfkotte - Kommt der Bürgerkrieg?

Udo Ulfkotte

Kommt der Bürgerkrieg?

mardi, 22 juin 2010

Europäische Union warnt jetzt vor Bürgerkrieg und der Rückkehr der Diktaturen in Europa

Europäische Union warnt jetzt vor Bürgerkrieg und der Rückkehr der Diktaturen in Europa

Udo Ulfkotte

http://info.kopp-verlag.de

 

Während deutsche Qualitätsmedien auf Wunsch des Kanzleramts die Lage weiterhin beschönigen, hat der EU-Kommissionspräsident Jose Manuel Barroso nun Klartext gesprochen: Bei einem Treffen mit Gewerkschaftsführern in Brüssel sprach er von einer »absehbaren Apokalypse« in Europa, einem Abgleiten in den Bürgerkrieg und der Ablösung demokratischer Regierungen durch Diktaturen in der EU.

 

Der EU-Kommissionspräsident Jose Manuel Barroso hat bei einem Treffen mit Gewerkschaftsführern vor apokalyptischen Zuständen in Europa gewarnt. Wenn die durch Rettungsschirme bereitgestellten Finanzmittel für bankrotte EU-Staaten nicht ausreichten (was absehbar sei), werde es schon bald Bürgerkriege und möglicherweise auch Militärputsche in der EU geben. Barroso sagte vor den sichtlich geschockten Gewerkschaftsführern, in Staaten wie Griechenland, Spanien und Portugal werde die Demokratie dann sehr schnell der Vergangenheit angehören. Die Diktatur werde zurückkehren. Es drohe in mehreren bankrotten EU-Staaten ein Militärputsch. Auch die Gefahr von Bürgerkriegen in vielen EU-Staaten werde derzeit immer wahrscheinlicher, weil die Kassen leer seien, die Bürger aber ihre gewohnten sozialen Leistungen auch weiterhin einfordern wollten.

 

Die Ausführungen des EU-Regierungschefs werden weltweit von allen führenden Medien zitiert (etwa von der Londoner Daily Mail), nur nicht in Deutschland. Grund: Die Bundesregierung hatte die führenden deutschen Medienchefs bei mehreren Treffen im Kanzleramt dazu aufgefordert, die wahre Lage innerhalb der EU aus Gründen der politischen Korrektheit zu beschönigen. Erst vor wenigen Tagen hatte die EU-Führung auch mitgeteilt, dass in fast allen EU-Staaten die Sozialsysteme vor dem finanziellen Kollaps stehen.

 

Um Unruhen zu vermeiden, dürfen deutsche Qualitätsmedien schon lange beispielsweise nicht mehr wahrheitsgemäß darüber berichten, dass Bürger bei Lebensversicherungen demnächst etwa 15 Prozent weniger Kapital zurückbekommen werden, als sie einbezahlt haben. Und auch wenn Wirtschaftsprofessor Hans-Werner Sinn über die kommende Staatskrise in Deutschland spricht, berichten deutsche Systemmedien darüber äußerst zurückhaltend. Dabei prognostizieren Geheimdienste schon seit Wochen sogar Kriege in Zusammenhang mit den horrenden Staatsschulden. Doch deutsche Qualitätsjournalisten müssen lügen und den Bürgern die Wahrheit vorenthalten. Dazu hatte sie die Kanzlerin aufgefordert.

 

Dabei kommen die jüngsten Äußerungen des EU-Kommissionspräsidenten Jose Manuel Barroso über bevorstehende Bürgerkriege in Europa keineswegs überraschend. Die Bundesregierung hat ja schon seit langem Geheimberichte erstellen lassen, in denen all jene Orte in Deutschland aufgelistet werden, in denen sie künftig schwere innere Unruhen erwartet.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

vendredi, 02 octobre 2009

Guerre civile entre histoire et mémoire

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1996

 

 

Guerre civile entre histoire et mémoire

 

Ouest-Editions a publié les actes du colloque La guerre civile entre histoire et mémoire organisé par le “Centre de re­cherches sur l'Histoire du Monde Atlantique” de l'université de Nantes. Dans son introduction, Jean-Clément Martin écrit à propos de la dénomination “guerre civile”: «Ce que les Américains ont qualifié de “Civil War”, à savoir les événements qui ont déchiré leur pays au XIXième siècle, nous l'appelons “guerre de Sécession”, en reprenant une version “nordiste” qui se serait sans doute transformée en “guerre de Libération” si les Sudistes avaient gagné. Nous prenons usuellement le soulè­vement du général Franco comme départ de la guerre civile espagnole, nonobstant les multiples affrontements meurtriers qui avaient émaillé les années précédentes. En revanche, nous parlons, en France, de “la Commune”, de “la révolution de Juillet”, voire de “la Révolution Française” ou de “la Résistance”, pour évoquer des étapes dramatiques de notre passé, hors du recours à la catégorie “guerre civile”». Nous citerons encore un court extrait: «Car la notion de guerre civile permet aussi de comprendre la fascination que celle-ci possède. Elle représente —encore aujourd'hui!— une forme de conflits dans laquelle, à l'opposé des conflits “déshumanisés” par les machines et surtout par l'atome, les individus trouvent des responsabilités véritables, des opportunités personnelles et des engagements réels, sans compter la possibilité de se con­fronter à la mort, dans une perspective romantique —ce qui, au-delà de tout jugement politique, semblait ne pas déplaire à Malraux— ou désespérée. La guerre civile devient la chance des aventuriers et des paumés, la revanche des exclus et des déclassés, la seule voie des plus démunis et des intellectuels radicaux. Sous cet aspect, elle ne se confine pas aux seules confrontations militaires, armées, mais elle s'exerce aussi bien dans les rivalités familiales que dans les querelles intellec­tuelles. L'Espoir de Malraux et Gilles de Drieu La Rochelle, indépendamment des liens entre les deux auteurs, constituent des exemples de cette façon de continuer la guerre sous, apparemment, d'autres formes» (Pierre MONTHÉLIE).

 

C.R.H.M.A., La guerre civile entre histoire et mémoire, Ouest Editions (1, rue de la Noë, F-44.071 Nantes Cedex 03), 1995, 250 p., 150 FF. La dernière publication du C.R.H.M.A. intitulée Le Maroc et l'Europe présente les communications faites lors d'une table ronde qui s'est tenue au «Centre d'études stratégiques de Rabat», 143 p., 120 FF.

jeudi, 05 mars 2009

Guerre d'Espagne: mémoire historique ou mémoire hystérique?

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Guerre d'Espagne : mémoire historique ou mémoire hystérique ?

 


Présenté sous un tel titre, l’article de Arnaud Imatz ne cache rien de son objet. On voit immédiatement où l’auteur veut en venir et c’est probablement une des raisons pour lesquelles la « Nouvelle Revue d’Histoire », dirigée par Dominique Venner, l’a publié.

Cette publication bimestrielle, taxée par la vulgate médiatique de non-conformisme au sens du politiquement correct historique, a déjà presque sept ans d’âge et recueille des signatures prestigieuses, plumes de marque, historiens et chercheurs de talent.

Dans la dernière livraison, Arnaud Imatz revient sur la toujours très controversée Guerre civile espagnole de 1936-1939, dont les plaies  sont rouvertes périodiquement, et il nous fait découvrir comment les politiques de gauche espagnols se sont emparés de l’histoire, très exactement comme nos politiques, hélas de toute tendance à de rares exceptions près, l’ont si bien fait en France en 1990 avec la loi Gayssot. Les Espagnols se trouvent donc, eux aussi, affublés d’une loi outrageusement partisane dont on ne sera pas étonné de lire qu’elle trouve son origine dans une proposition du Parti communiste. Cette loi de « Mémoire historique » a été adoptée par les députés espagnols le 26 décembre 2007. Le lecteur ne sera pas surpris de trouver au détour de cette loi le célèbre juge Garzon, connu même sur le plan international puisqu’il a été l’initiateur du mandat d’arrêt lancé contre le général Pinochet : ce juge se consacre à corps perdu à la recherche des « criminels du camp national ». Enfin, là aussi, on assiste à une bataille de chiffres des victimes, décidément pomme de discorde éternelle et arme suprême de la propagande idéologique.

Cet article historico-politique est passionnant et il montre qu’en Espagne, tout comme dans une grande partie des pays appartenant à l’Union européenne, l’histoire est aujourd’hui confisquée par le pouvoir politique relayé par la justice, et donne lieu à l’intauration de « lois mémorielles » et à la judiciarisation du fait historique.

Polémia




Tous les historiens reconnaissent l’impressionnant développement  économique et social de l’Espagne après la mort de Franco. Tous admirent l’exemple de transition démocratique pacifique et tolérante donné au monde par le peuple espagnol. Bien sûr, selon leurs convictions, les analystes s’affrontent : certains considèrent que ce processus s’étend de 1966 à 2004, d’autres soulignent l’importance de l’approbation de la Constitution de 1978, d’autres encore mettent en valeur l’arrivée au pouvoir de Felipe Gonzalez et du PSOE (1982), d’autres enfin insistent sur le retour de la droite de José Manuel Aznar (1996), mais tous reconnaissent la formidable et spectaculaire transformation du pays. Pendant près de trois décennies, deux principes ont animé « l’esprit de la transition » : le pardon réciproque et la concertation entre gouvernement et opposition. Il ne s’agissait pas d’oublier le passé (la conscience de l’histoire est au contraire une des conditions pour éviter de répéter les erreurs), mais de le surmonter, de regarder résolument vers l’avenir. On aurait pu penser qu’au fil des ans le calme et la sérénité se seraient imposés, que soixante dix ans après la fin de la Guerre civile les historiens se seraient adonnés enfin librement aux plaisirs tranquilles du champ de leur connaissance, mais il n’en est rien.

Depuis son accession au pouvoir, en 2004, plutôt que de contribuer à effacer les rancœurs, José Luis Rodriguez Zapatero, a délibérément choisi de raviver la bataille culturelle et de rouvrir les blessures du passé. Zapatero a expliqué en de nombreuses occasions comment la mémoire de son grand père, Juan Rodriguez Lozano, fusillé par les franquistes, a motivé ses convictions politiques. Une explication tronquée, quand on sait que son grand-père, qui fut exécuté par les troupes nationales, en 1936, pour avoir franchi leurs lignes dans un but d’espionnage, avait été aussi décoré, en 1934, pour avoir contribué  à restaurer la légalité républicaine sous les ordres du général Franco et participé à cette occasion à la répression des mineurs d’Asturies. Mais le caractère monstrueusement fratricide de la guerre civile semble évacué par Monsieur Zapatero et son gouvernement. 

On pourrait rappeler quelques exemples frappants et cruels comme celui des prestigieux écrivains, Antonio et Manuel  Machado, qui se trouvaient chacun dans des camps différents, ou celui du dirigeant anarchiste Buenaventura Durruti dont les deux frères étaient phalangistes, ou encore celui de Constancia de la Mora, l’épouse communiste du général de l’aviation républicaine Hidalgo de Cisneros, dont la sœur Marichu était une journaliste phalangiste. Il serait inutile de s’acharner à répéter que la plupart des ministres de la démocratie espagnole, qu’ils soient de gauche ou de droite, ont des pères, des oncles et des grands-parents qui ont soutenu le régime franquiste. Tout cela,  Monsieur Zapatero  le sait. Le grand-père de son épouse, Sonsoles Espinosa, n’était-il pas  lui aussi franquiste ? Mais le chef du gouvernement espagnol et son équipe n’en ont cure. La politique n’est pas le terrain de la morale, pas plus qu’il n’ait celui du droit ou de l’histoire.

Les raisons de la pugnacité du gouvernement socialiste espagnol sont essentiellement politiques. Il s’agit de donner quelques gages au parti communiste et à l’extrême gauche qui, depuis des décennies, cherchent invariablement à imposer leur vision unilatérale de l’histoire, et, par la même occasion, à condamner moralement la droite conservatrice pour l’écarter durablement du pouvoir.

Avec l’aide du député travailliste maltais, Léo Brincat, le 17 mars 2006, Zapatero a d’abord fait adopter par la commission permanente, agissant au nom de l’assemblée du Conseil de l’Europe, une recommandation sur « la nécessité de condamner le franquisme au niveau international ». Par la suite, il n’a eu de cesse de faire voter par le parlement espagnol une loi de « Mémoire historique » dont l’origine se trouve dans une proposition du Parti communiste  (Izquierda Unida).

L’expression « mémoire historique » est devenue le lieu commun de la culture espagnole. L’effort de récupération de la mémoire historique n’est évidemment pas un mal en soi, mais encore faut-il qu’il ne soit pas un prétexte pour que les plus sectaires s’arrogent le droit de séquestrer l’histoire ou de la manipuler. On ne peut pas, en effet, comparer la récupération de la mémoire pour ressusciter la haine de l’autre avec la récupération de la mémoire pour rénover la fraternité et la concorde. Or, si la « loi de Mémoire historique », du 26 décembre 2007, reconnait et amplifie justement les droits en faveur de ceux qui ont pâti des persécutions ou de la violence pendant la Guerre civile et la dictature, elle accrédite une vision manichéenne de l’histoire et contrevient à l’éthique la plus élémentaire. « Le pire de la prétendue “mémoire historique”, déclare le prestigieux hispaniste américain Stanley Payne, ce n’est pas la falsification de l’histoire, sinon l’intention politique qu’elle renferme, sa prétention à fomenter l’agitation sociale. » (Congrès universitaire de Madrid du 5.11.2008).

Une des idées fondamentales de la « loi de Mémoire historique » est que la démocratie espagnole est l’héritage de la Seconde République. Un point de vue d’autant plus discutable que le processus de transition fut mené conformément aux mécanismes prévus par le régime de Franco et qu’il fut dirigé à la fois par un roi désigné par le généralissime et son premier ministre qui était l’ancien secrétaire général du Movimiento. Selon le raisonnement de la « mémoire historique », la Seconde République, mythe fondateur de la démocratie espagnole, aurait été un régime presque parfait dans lequel l’ensemble des partis de gauche auraient eu une action irréprochable. Pour couronner le tout, mettre en cause cette absurdité ne saurait être qu’une apologie exprès ou déguisée du fascisme. 

Les anomalies de cette loi ne se comptent plus. Elle effectue un amalgame stupide entre le soulèvement militaire, la guerre civile et le régime de Franco qui sont autant de faits distincts relevant d’interprétations et de jugements différents. Elle exalte les victimes et les assassins, les innocents et les coupables lorsqu’ils sont dans le camp du Front populaire et uniquement parce qu’ils sont de gauche. Elle confond les morts en action de guerre et les victimes de la répression. Elle jette le voile de l’oubli sur toutes les victimes « républicaines » qui moururent aux mains de leurs frères ennemis de gauche. Elle encourage et justifie tout travail visant à démontrer que Franco à mener délibérément et systématiquement une répression sanglante pendant et après la guerre civile. Elle reconnait, enfin, le légitime désir de beaucoup de personnes de pouvoir localiser le corps de leur ancêtre, mais refuse ce droit à ceux qui étaient dans le camp national sous le prétexte fallacieux qu’ils ont eu tout le temps de le faire à l’époque du franquisme.

Après l’adoption de la loi de « mémoire historique » et les débats qui l’ont précédée, fin 2007, la boîte de Pandore est ouverte. Dès le 15 décembre 2006, diverses associations « pour la récupération de la mémoire », avaient déposé des plaintes auprès du Juge d'instruction de l’Audience nationale, Baltasar Garzón « pour détention illégale en vertu d'un plan systématique d'élimination physique de l'adversaire pendant la guerre civile (1936-1939) et les années de l'après-guerre, méritant le qualificatif juridique de génocide  et de crime contre l'humanité ». L’Audience nationale est l’héritière directe du Tribunal de l'ordre public de la dictature franquiste qui fut supprimé en 1977. Le juge Garzón est un magistrat instructeur connu internationalement pour avoir lancé un mandat d’arrêt contre Augusto Pinochet. Il avait effectué une brève incursion dans la vie politique comme second sur la liste du parti socialiste de Madrid derrière Felipe Gonzalez. Dans une ordonnance, qui échappe à la logique de la procédure judiciaire et ne suit aucune méthodologie historique, Baltasar Garzón s’est déclaré compétent. Un magistrat instructeur se doit de diligenter une affaire à charge et à décharge. Lui, soutient une thèse. Lorsque les faits le gênent, il les écarte. La responsabilité et la cruauté de la guerre civile et des exactions retombent, selon lui, entièrement sur un seul camp. L’affaire est donc entendue ! Il n’y a pas à prendre en compte les crimes survenus pendant la IIème  République, ni les crimes du Front Populaire. Et qu’on ne lui reproche pas d’avoir rejeté une plainte contre le communiste, Santiago Carrillo, un des principaux responsables du massacre de Paracuellos, en se fondant sur des arguments et une jurisprudence exactement inverses. La plainte contre le « prétendu » crime de Paracuellos (plus de 4000 morts) était, dit-il, « inconsistante » : les faits, avaient été jugés, les victimes avaient été identifiées (quand ?, où ?, comment ? il ne le précise évidemment pas !), en outre, ajoute-t-il, « ces faits n’attentaient en rien aux hautes autorités de la nation » !

Enfermé dans sa logique sectaire, Garzón n’a pas l’ombre d’une hésitation. Les vainqueurs, selon lui, ont porté atteinte à la légalité en s’insurgeant contre le Gouvernement de la République et ont eu le temps d’identifier leurs victimes et de demander réparations. Les vaincus, en revanche, n’ont jamais pu le faire et en conséquence le délit perdure aujourd’hui. Mieux, les « rebelles » voulaient exterminer leur opposant de façon systématique et donc « le caractère de crime contre l’humanité imprescriptible tel qu’il est défini par les normes du droit pénal international ne fait pas de doute ». Frisant le grotesque, Garzón demande les certificats de décès de Franco et de 34 dignitaires franquistes « pénalement responsables ». Il autorise les exhumations de corps des fosses contenant des républicains dans les délais les plus urgents et demande la formation de groupes d’experts et l’utilisation de tous les moyens techniques et scientifiques à cet effet. Ultime incongruité, Garzón réclame la liste des principaux dirigeants de la Phalange Espagnole entre le 17 juillet 1936 et décembre 1951, ignorant sans doute que la Phalange de José Antonio, très divisée à l’heure de se joindre aux forces de droite insurgées, en juillet 1936, fut dissoute le 19 avril 1937 et que le second chef de la Phalange fut condamné à mort par un tribunal militaire franquiste.

Le recours immédiat contre cette décision de justice intenté devant la salle pénale de l’Audience nationale par l’Avocat général, Javier-Alberto Zaragoza Aguado, a fait beaucoup moins de bruit.  Dommage ! car ce texte qui est celui d’un professionnel du droit est une véritable leçon, un camouflet pour le juge Garzón. « Dans un état de droit, écrit Javier Zaragoza, le procès pénal est sujet à des règles et des limites de procédure qui en aucun cas ne peuvent être violées ». L’Avocat général blâme le juge pour avoir contourné la loi d’amnistie votée par les premières Cortès démocratiques en 1977. « Questionner la légitimité d'origine de cette loi, écrit-il, et pire la stigmatiser comme loi d'impunité serait la sottise juridique absolue ». Il reproche encore au juge Garzón : d’ignorer les règles de compétence territoriale des tribunaux, d’utiliser une habile « couverture » pour qualifier les actes de crimes contre l’humanité et de construire un « échafaudage juridique singulier » qui lui permet de lier les délits de détentions illégales avec un délit contre les hautes autorités de l'État, alors que non seulement les responsables théoriques de ces délits sont morts mais que, en raison de leur condition et responsabilité, la compétence de l'instruction revient au Tribunal suprême. « En résumé, écrit Zaragoza, on peut affirmer que la prétention de tout connaître et sur tous en une seule procédure rompt les plus élémentaires règles du procès pénal et débouche inévitablement sur une inquisition générale interdite par notre Constitution ».

En ce qui concerne la qualification de génocide ou de lèse humanité des faits dénoncés, l’Avocat général explique pourquoi celle-ci n’est juridiquement pas applicable dans ce cas. Le corpus de normes qui conforme la légalité pénale internationale n'existait pas à l'époque ou les actes ont été commis ; cette qualification juridique ne peut donc s'appliquer rétroactivement sans attenter à la légalité pénale dans toute sa dimension ; enfin, l'exécution des faits est antérieure à leur qualification dans le droit pénal international.

Mais le juge Garzón n’est pas du genre à faire amende honorable. Le 18 novembre, coup de théâtre ! Alors que la Salle pénale de l’Audience nationale est sur le point de se réunir pour prendre sa décision, afin d’éviter de courir le risque d’être désavoué par ses pairs et, vraisemblablement, sous la pression de certains de ses amis politiques qui jugent qu’il en faisait trop, Garzón a édicté une nouvelle ordonnance. Dans un texte interminable, saturé de faits incertains, de semi-vérités et d’interprétations contestables, le juge prétendait se justifier et « ratifier avec force tous les motifs qui l’ont amené à considérer cette instruction nécessaire ». Mais après 148 pages de cette eau, il déclarait que la responsabilité pénale du dictateur Franco et des dignitaires franquistes était éteinte en raison de leurs morts et, simultanément, que l’instruction des disparitions était désormais de la compétence des juges de provinces où se trouvent les fosses qu’il avait ordonné d’ouvrir.

Nouvelle contradiction juridique de Garzón, soulignée immédiatement par les présidents de plusieurs tribunaux supérieurs de province : on ne voit pas comment des auteurs de crimes seraient décédés pour Madrid sans l’être pour d’autres villes. Deux jours plus tôt, le Professeur Stanley Payne, célèbre spécialiste américain de la guerre-civile espagnole, prononçait sa propre sentence devant la presse : « L’idée qu’un juge puisse se déclarer en faveur de l’annulation de la transition et de la loi est parfaitement grotesque ».

Critiquables sur le plan juridique, les ordonnances de Garzón ne le sont pas moins au niveau historique (1). Tout d’abord - est-il besoin de le rappeler ? - les historiens ne reconnaissent ni aux politiciens, ni aux juristes la moindre autorité pour venir leur dire comment il faut écrire les faits et interpréter le passé ? Quant aux objections de fond, elles sont multiples.

Ce n’est pas le soulèvement militaire de juillet 1936 qui est à l’origine de la destruction de la démocratie. C’est parce que la légalité démocratique avait été est détruite par le Front populaire que le soulèvement s'est produit. En 1936, personne ne croyait en la démocratie libérale telle qu’elle existe aujourd’hui en Espagne. Le mythe révolutionnaire partagé par toute la gauche était celui de la lutte armée. Les anarchistes et le parti communiste, un parti stalinien, ne croyaient certainement pas en la  démocratie. L’immense majorité des socialistes et, notamment leur leader le plus significatif, Largo Caballero, le « Lénine espagnol », qui préconisait la dictature du prolétariat et le rapprochement avec les communistes, n’y croyait pas davantage. Les gauches républicaines du jacobin Azaña, qui s’étaient compromises dans le soulèvement socialiste de 1934, n’y croyaient pas plus. Quant aux monarchistes de Rénovation espagnole, aux carlistes, aux phalangistes et à la majorité de la CEDA (Confédération espagnole des droites autonomes), ils n’y croyaient pas non plus.

Les anarchistes se révoltèrent en 1931, en 1932 et en 1933. Les socialistes se soulevèrent  contre le gouvernement de la République, du radical Alejandro Lerroux, en octobre 1934. Appuyé par toutes les gauches, ce soulèvement fut planifié par les socialistes comme une guerre civile pour instaurer la dictature du prolétariat. Dès son arrivée au pouvoir, le Front populaire ne cessa d'attaquer la légalité démocratique. Le résultat des élections de février 1936 ne fut jamais publié officiellement. Plus de 30 sièges de droite furent invalidés. Le président de la République, Niceto Alcalá Zamora fut destitué de manière illégale. La terreur s'imposa dans la rue, faisant plus de 300 morts en trois mois.

On aimerait bien que les nombreux « écrivains d’histoires », défenseurs des vieux mythes du Komintern, nous expliquent la réflexion lapidaire du libéral antifranquiste, Salvador de Madariaga, tant de fois reprise par les auteurs les plus divers : « Avec la rébellion de 1934, la gauche espagnole perdit jusqu’à l’ombre d’autorité morale pour condamner la rébellion de 1936 ». On aimerait qu’ils nous disent pourquoi, à l’exclusion de la Gauche républicaine et de l’Union républicaine, les militants et sympathisants de toutes les autres tendances, depuis les partis républicains de Lerroux, Martinez Velasco, et Melquiadez Alvarez, jusqu’aux traditionalistes carlistes, furent tous considérés en territoire front populiste comme des ennemis à extirper. Pourquoi les ministres démocrates du parti radical Salazar Alonso, Abad Conde, Rafael Guerra del Rio furent condamnés à mort et assassinés. Pourquoi des libéraux comme José Ortega y Gasset, Perez de Ayala, Gregorio Marañon, qui étaient alors « les pères fondateurs de la République », ou encore des démocrates et républicains comme le Président du parti radical, ex-chef du gouvernement de la République, Alejandro Lerroux ou le philosophe catholique-libéral, ami de Croce et d’Amendola,  Miguel de Unamuno, choisirent le camp national ? Pourquoi les nationalistes basques ont préféré négocier leur reddition avec le Vatican, les italiens et leurs frères carlistes-requetes (Pacte de Santoña, 24 août 1937) plutôt que de poursuivre la lutte aux côtés de révolutionnaires « persécuteurs et athées ». Pourquoi l’assassinat du député Calvo Sotelo, menacé de mort au Parlement par le ministre de l’intérieur socialiste, Angel Galarza, et liquidé par des militants du PSOE qui furent aidé dans leur crime par les forces de l’ordre, puis protégés par les députés socialistes Vidarte, Zugazagoitia, Nelken et Prieto, n’a-t-il jamais été condamné par les Cortès démocratiques de l’après-franquisme ?

Le caractère partisan de l’action de Baltasar Garzón est flagrant. Mais imaginons que le juge médiatique fasse des émules à droite. Au nom de quels principes pourrait-on alors leur empêcher d’instruire des plaintes contre les responsables : des  200 tchekas qui fonctionnaient à Madrid ; des fosses nationales de Paracuellos (plus de 4000 morts), Torrejón de Ardoz et Usera ; de l’assassinat de García Lorca (cf. notre article dans ce numéro) par les uns et des assassinats de Muñoz Seca, Maeztu, Ledesma et Pradera par les autres ; des massacres républicains de Malaga et de la  prison Modèle de Madrid ; de l’extermination de près de 7000 religieux et de 12 évêques ; du bombardement de Cabra (plus de 100 morts et 200 blessés civils) dans des conditions aussi barbares que Guernica (126 à 1635 morts selon les sources) ; de la détention illégale de José Antonio Primo de Rivera quatre mois avant le soulèvement et de son assassinat, en novembre 1936, après une parodie de procès ; des réglements de compte de Marty le boucher d’Albacete, responsable de la mort de plus de 500 brigadistes internationaux ; de l’assassinat du dirigeant anarchiste, Buenaventura Durruti, par les communistes ; de la disparition d’Andreu Nin, le dirigeant du POUM torturé à mort par les staliniens ; des purges de mai 1937 à Barcelone, contre les dissidents de l’orthodoxie stalinienne traités au préalable de trotskistes et d’agents fascistes ; des exécutions sommaires à l’issue de la petite guerre civile qui se déroula à l’intérieur de la guerre civile dans le camp Front populiste, à Madrid, en mars 1939 ; de la spoliation par Moscou des réserves d’or de la Banque d’Espagne ; des milliers d’enfants évacués de force par les autorités républicaines vers l’URSS et qui perdirent ainsi à jamais leur identité … et de tant d’autres exemples polémiques ?

Venons-en enfin au nœud de la controverse : les chiffres de la répression et l’existence de fosses aux victimes non identifiées. Depuis la fin du conflit, de part et d’autre, les protagonistes et leurs descendants les plus enragés n’ont cessé de se jeter des cadavres à la face. Pendant près de 70 ans les chiffres sur les répressions ont oscillé de façon inconsidérée et absurde. Les auteurs favorables au Front populaire, ont cité tour à tour 500 000, 250 000, 192 548 (selon les prétendus propos d’un fonctionnaire franquiste jamais identifié), 140 000, 100 000 (selon Tamames, qui était alors communiste), et, finalement, « plusieurs dizaine de milliers » (selon Hugh Thomas). Par ailleurs, ils ont toujours assuré que les quelques milliers, voire dizaine de milliers de franquistes victimes de la répression l’avaient été parce que le gouvernement de la République était débordé par des groupes incontrôlés alors que dans la zone nationale l’action répressive était préméditée et avait pris l’allure d’une extermination.

En revanche, pour les franquistes qui se fondaient sur les investigations du Ministère public menées dans le cadre de la « Causa general » (procès instruit contre « la domination rouge », au début des années 40, dont l’énorme documentation est conservée, depuis 1980, à l’Archivo Histórico Nacional de España de Madrid et qui n’a jamais été publiée intégralement), il était avéré que les front-populistes avaient commis 86 000 assassinats et les nationaux entre 35 et 40 000.  Pour les besoins de sa cause, Baltasar Garzón retient aujourd’hui le chiffre de 114 266 républicains disparus « un chiffre qui, dit-il, pourrait être révisé par un groupe d’experts ». Il prétend nous faire croire qu’ils seront identifiés grâce aux techniques modernes sans préciser bien entendu que la constitution d’une banque d’ADN et l’utilisation systématique de tests constituerait une dépense colossale pour l’État espagnol. Mais peut-on accorder quelque crédit à un juge qui ne cite jamais un expert ou historien adverse ? En fait, dans la majorité des publications que manie Garzón, le préjugé des auteurs se fonde souvent sur des estimations approximatives et des témoignages relevant de l'imagination. Enfin, lorsque ces publications présentent des relations nominales, elles attribuent fréquemment à la répression franquiste des victimes qui, en réalité, sont mortes en action de guerre ou mortes en combattant pour le camp national. Il en résulte que le bilan final est inacceptable sur le triple plan moral, juridique et historique.

Un seul exemple suffit à illustrer l’ampleur des passions dangereuses que l’imprudence des autorités et des médias déchainent dans l’opinion publique. Le 5 mars 2008, l’information de la découverte de nouvelles fosses à Alcala de Henares circulait dans toutes les agences de presse. Immédiatement, le gouvernement espagnol insinua qu’il s’agissait de nouvelles victimes du franquisme, puis, lorsque quelques spécialistes firent remarquer que cette ville étant restée sous contrôle du Front Populaire jusqu’à la fin du conflit, il était peu probable qu’il s’agisse de victimes du camp républicain, le silence se fit et l’affaire fut étouffée.  

Même s’il reste à déterminer de façon rigoureuse les morts irrégulières qui, de part et d’autre, n’ont pas encore été inscrites dans les registres d’état civil, on peut considérer que les chiffres pratiquement définitifs des deux répressions sont les suivants : 60 000 victimes chez les nationaux et 80 000 victimes chez les républicains (50 000 pendant la guerre et 30 000 exécutés après la fin du conflit). Des chiffres si lourds n’ont pas besoin d’être exagérés pour rendre compte de l'intensité des passions et l’étendue des massacres qui ont affecté les deux camps.

Plus de trente ans après l’instauration de la démocratie en Espagne, on ne peut toutefois manquer de s’interroger sur un fait étrange. Alors que les publications plus ou moins sérieuses sur la répression se succèdent à bon rythme, personne ne semble avoir eu l’idée de réunir les très nombreux témoignages de tous ceux qui, dans un camp comme dans l’autre, ont essayé en pleine guerre civile de sauver quelqu’un dans le camp ennemi. Ce sont pourtant ces personnes qui sont les plus méritantes, les seules dignes de figurer au tableau d’honneur d’une guerre civile. Mais ne rêvons pas, car parmi ces hommes d’exception devraient figurer en bonne place : Julian Besteiro, le social-démocrate qui s’opposa à la ligne bolchévique de son parti et mourut, en 1939, dans les geôles franquistes ; Melchor Rodriguez García, l’anarchiste de la CNT, délégué général des prisons, qui s’opposa au communiste-stalinien Santiago Carrillo et sauva des centaines de vie humaines, en novembre et décembre 1936, ou José Antonio Primo de Rivera, le chef de la Phalange, assassiné par les front-populistes puis instrumentalisé par les franquistes, qui proposa sa médiation avec insistance au Président des Cortes, Diego Martinez Barrio, en août 1936… et la guerre idéologique, fomentée par tant de politiciens irresponsables, risquerait de s’éteindre.


Arnaud  Imatz
Nouvelle revue d’Histoire, janvier/février 2009 n°40
Polémia
28/02/09

Note :
(1)  Les origines et les causes de la guerre civile espagnole et la nouvelle historiographie du conflit ont fait l’objet d’un dossier publié dans le numéro 25 de la NRH: 1936-2006 : la guerre d’Espagne.

Arnaud  Imatz, docteur d’état ès sciences politiques, diplômé d’études supérieures en droit, ancien fonctionnaire international à l’OCDE, a publié sur la Guerre d’Espagne : « La guerre d’Espagne revisitée », Paris, Economica, 1993, « José Antonio, la  Phalange Espagnole et le national-syndicalisme », Paris, Godefroy de Bouillon, 2000 et, plus récemment, « José Antonio : entre odio y amor. Su historia como fue », Barcelone, Áltera.

 

Arnaud Imatz